Tout au bout du bord de l’extrême, derrière les dernières montagnes du Monde, s’élève le Château des 100 000 pièces Les murailles, et les tours et les étages de ce palais s’élèvent, à ce qu’il vous paraît, bien au-delà des nuages, au-dessus des cimes.
LA ROUTE AU CONDUCTEUR BOURRÉ
LA ROUTE AU CONDUCTEUR BOURRÉ

LA ROUTE AU CONDUCTEUR BOURRÉ

J’ai mal au crâne. Oh ancêtres Ombres, j’ai tellement, tellement mal au crâne
Bon
Reprenons
Je suis une Ombre. Une Ombre fraternelle, née sur une terre désolée, dans la lugubre ville d’N. Juste N. Elle ne porte pas d’autre nom cette ville. Je me souviens d’y avoir passé une enfance insouciante, jusqu’au jour où j’ai été appelé sur Terre pour rejoindre mon Accompagnée, la personne dont je serai l’Ombre jusqu’à la fin de ses jours, et des miens également.
Sauf que les choses ne s’étaient pas passées exactement comme prévu.

Je me souvenais que je m’étais souvenue que mes souvenirs étaient revenus. Crotte mes phrases n’ont plus aucun sens. Bon. On reprend. On respire. On inspire. Et on se souvient.
« Le souvenir de ma Perte remonte à ma mémoire. Je n’avais jamais compris comment diable ma propriétaire avait à l’époque réussit à m’enfermer derrière un mur. Ses mots me remontent dans la gorge.
« Ne bouge pas, ne me suis pas ! Cette quête doit être réalisée seule…Seule… »
Je comprends soudain tout. Tout. Ma maîtresse était partie dans ce Château. Et y est probablement morte. »

Ces mots, venus d’un temps lointain, très lointain, sonnent faux. Une certitude s’ancre en moi : ce n’est pas la vérité. J’avais été certes séparée de mon Accompagnée, mais le château n’en était pas en cause. Et j’avais une petite idée sur la chose (ou plutôt la personne, je pense que nul ne pensait encore au château comme un être inanimé) qui m’avait fait ainsi culpabiliser.
Soudain la vérité m’explose au visage

Je me souviens mal du moment où tout a basculé. Anaël, mon Accompagné.e, était un bébé babillant, un enfant joyeux et souriant, puis un.e adolescent.e renfrogné.e et malheureuxse. J’étais de nature exubérante, et passer des journée entière collée aux pieds d’un.e Anaël prostré dans sa chambre me pesait fortement sur le moral.
Il pleuvait ce jour-là, des trombes et des cordes d’une pluie glaciale malgré le mois d’août où avait eu lieu l’accident. Nous avions dix-sept ans.
Iel avait traversé sans trop regarder, les yeux fixés sur son téléphone, tandis que, accrochée à ses pas, je baillais d’un ennui profond.
La nuit était déjà tombée
La voiture roulait sans phares

Voyez le tableau : un samedi soir, une rue déserte, un conducteur alcoolisé, paniqué, qui continue sa route. Et Anaël, maon Anaël, dans une mare de sang, les membres désarticulés comme le pantin qu’iel portait en pendentif. Et moi, paniquée également, ne voulant pas mourir, pas si tôt, pas sans avoir vu le monde, qui décide de commettre l’irréparable. Au moins je disposais de suffisamment de sang pour accomplir le rituel

Mes premiers pas libres furent vacillants, comme ceux d’un enfant commençant à marcher sans l’aide de ses parents

Par contre, comment j’avais décidé de venir ici, dans ce Château maudit, ça, je n’en avais pas le commencement d’une idée

Bon, le pourquoi du comment avait été à peu près éclairci.

J’avais toujours les yeux fermés, mais je ne comptais pas les rouvrir pour le moment, envahie d’une question : et ensuite ?
Je me souvenais vaguement de mon entrée dans le Château, des premières pièces traversées, puis… Puis plus rien. Il s’était passé des choses entre temps, je le savais, beaucoup de choses, des choses importantes. Puis un vide, un vide immense, qui avait duré longtemps, très longtemps. Comme si j’avais fait un somme qui aurait duré des années.
Je décidai de finalement ouvrir les yeux
Et hurlai. Hurlai, du plus profond de mon être
Je me trouvai toujours dans le Manoir, mais dans une sorte de cour intérieure. Le ciel était peu étoilé, la lune à peine un croissant descendants. Je me trouvai allongée, dans une mare de sang, voyant une voiture sans phare qui s’éloignait à toute vitesse. La rue que la pièce imitait était exactement la même où Anaël avait eu son accident. Sauf qu’Anaël n’était pas là, et que c’était moi, le pantin désarticulé qui baignait dans son sang, allongée seule dans la rue.
Je ne pouvais pas bouger mon corps, mais je pouvais hurler. Je commençai par crier « Anaël » car c’était la seule personne dont je me souvenais, puis « Maman »
Et enfin, venu des tréfonds de ma mémoire, un
« ANALYANN » sorti du plus profond de mes entrailles. Elle pouvait m’entendre, ça, je le savais.
« ANALYANN »

Auteur : … sous le pseudo « Ombre »

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