Liram accompagné d’Orgonn
Je ne pensais pas que le monde serait si gris. Ni trop noir ni trop blanc. Gris et lisse, sans tempête. Trop parfait. Mais le béton uni emprisonne les vies en habitudes monotones. Cela fait déjà 3 heures que je suis là, en compagnie d’Orgonn, qui me montre le monde. Il me laisse entrer ses pensées et tout voir. Les réussites et les défaites… L’humain ne ressent donc que le banal ?
L’Ancien m’avait prévenu. Il a tellement vécu qu’il en sait plus que tous ceux qui pensent savoir. Mais Il continue à apprendre, car Il est plus qu’un homme. Pourquoi, alors, m’a-t-il envoyé auprès d’eux ?
– Liram ?
– Oui, Orgonn
– Tu as fini ?
– Oui…
Il se relève du banc de pierre – grise – placé au centre de la pièce nue.
– Tu ne sais rien de ce qu’Il sait.
– Oui
– Tu ne sauras jamais tout ce qu’Il a appris.
– Oui
– Mais tu deviendras plus fort.
– Quoi !?
Mais pour l’instant tu es faible. Trop faible. Alors pourquoi toi ?
– Qu’est-ce que tu racontes ? Je ne peux pas dépasser notre Maître.
– L’Ancien peut toujours perdre sa force.
Je sais qu’il se moque de ce nom. L’Ancien. Pourtant c’est ce qu’Il est. Plus vieux que les pierres et les racines, plus sage que les nuages et les cours d’eau, plus grand que l’univers et les étoiles. Fort de Son expérience, de Sa polyvalence. L’Homme final. Alors pourquoi ces hommes ont une force qu’il ne connait pas ?
– Prends du recul, Orgonn.
Tu es fort de tes doutes et de ton insouciante innocence. Moi qui suis pourtant bien plus jeune, je ne suis plus naïf car je suis Lui. Dans Sa puissance comme dans Sa faiblesse. Comme dans Sa faiblesse.
– Liram, tu m’as dit que tu voulais apprendre. Je t’ai montré ce que j’avais vécu. Peut-être voudrais-tu maintenant savoir ce que j’en pense ? Ce que j’ai ressenti ?
A quoi cela me servira-t-il ?
– Bien sûr !
– Je ne suis, aujourd’hui, plus sûr de grand-chose. A part que je suis perdu dans les tumultes de ma vie. J’aimerais faire des pauses, parfois. Mais c’est impossible. Alors je continue d’avancer. Tu vois, je ne peux plus qu’avancer et croire que je pourrais toujours aimer.
– Qui ?
– Personne… La vie, mon Idéal, ce pour quoi je lutte, tu vois ?
Non, je ne vois pas. Les instructeurs ne m’ont jamais parlé d’idéal. Ni que l’Homme pouvait rêver.
– Et qu’est-ce que c’est alors, ton « idéal » ?
– Je ne sais pas encore. Je pense que nos buts sont inconnus de nous jusqu’à ce qu’on apprenne qu’on ne les atteindra jamais. Je ne veux pas de mes rêves pour réalité, tu comprends ?
Non.
– Pour… Pourquoi ?
– Car ce ne seraient plus des rêves.
C’est étrange. Je pense que je vais clore là notre entretien, tous ces palabres m’ont donné… faim !?
– Orgonn… J’ai… Faim…
– Attends, tu es tout fiévreux… Qu’est-ce que…
Noir total. Je m’endors.
…
L’Humain ne ressentirait-il que le banal ? Ou est-ce moi qui ne sais pas voir ? Père, aidez-moi dans cette quête…
Autrice : Shvimwa, sous le pseudo « Shvimwa »