Tout au bout du bord de l’extrême, derrière les dernières montagnes du Monde, s’élève le Château des 100 000 pièces Les murailles, et les tours et les étages de ce palais s’élèvent, à ce qu’il vous paraît, bien au-delà des nuages, au-dessus des cimes.
LA PIÈCE POILUE
LA PIÈCE POILUE

LA PIÈCE POILUE

Aifé

Ah ouais. Carrément. C’est plus que bizarre ici. C’est une pièce sombre, sans lumière, sans ouverture. Heureusement que je peux passer à travers la matière, autrement je serais prisonnière ici.

Bien. Puisque je ne vois rien, autant me concentrer sur mes autres sens. M’abandonner ici sans vérifier au préalable ma sécurité pourrait s’avérer mortel.

Je n’entends rien. Enfin, rien, à part ma respiration presque silencieuse. Aucune odeur particulière non plus. Par contre, quelque chose de doux et chaud sous mes pieds nus m’interpelle.
Calmement, je m’adosse à la paroi, de la même matière.

Des poils. Des putains de poils, partout, grands, chauds, doux, comme si une immense fourrure recouvrait la pièce, du sol au plafond.

Je me laisse tomber à genoux. Aucun danger imminent. Parfait.

Autant en profiter pour dormir. Je ne me suis pas laissée emporter par le sommeil, depuis que Néo m’a torturée pour la dernière fois. Autant dire que ça remonte à quelques jours.
Je ferme les yeux. En réalité, je n’ai pas dormi depuis mon serment. Quel sera mon premier sommeil en tant que spadassine ?

Tourmenté.

Tourmenté, tel est le mot. Je ne parviens pas à me laisser sombrer. Tout me rappelle Lià. Tout me rappelle Tamaïs. Tout me rappelle la situation de merde dans laquelle j’ai sauté à pieds joints. Est ce que Lià me pardonnera ?

Certainement pas.

Je me retourne sur moi même, me recroqueville, m’agite, encore et encore. Peut être devrais je continuer ma route quelques heures encore ? Une voix me murmure soudainement des paroles apaisantes.

Je sombre.

Lorsque je me réveille, la pièce est toujours aussi noire. J’ai perdu la notion du temps. Je souris. J’ai réussi à tout oublier, juste pour une nuit. Que se serait-il passé, s’Il n’était pas intervenu ?
Une voix résonne dans ma tête, me tirant brusquement de mes pensées.
Lui. Le Maître.

« Bonjour. »

Soft. Je réplique.

-Bonjour. Que me voulez vous, « encore » ?

La tension est palpable. Pourtant, c’est d’une voix dénuée d’émotions, comme à son habitude qu’il répond.

« J’ai une mission pour toi. »

Je me redresse, attentive. Il ne me permettra pas d’échec.

-Que dois-je faire ?

Pause. Il ne répond pas, quelques instants, comme s’il pressentait mon impatience.

« Objet de ta première mission : Incendier un village de paysans réfractaires. Ils n’ont pas payé l’impôt leur permettant de vivre sous mon toit. Mes avertissements n’ont servi à rien. Il est temps de passer aux choses sérieuses. »

Je hoche la tête. Il murmure, continuant.

« Tu es une des rares de mes alliés qui soit pyromane, et capable de sortir vivante de cette situation. C’est un moyen de mesurer ta valeur. »

-Je ne vous décevrai pas.

Ricanement. Je frissonne, en me relevant rapidement.

« Prouve moi que j’ai bien fait de te prendre dans mes rangs. »

Silence. Notre échange est terminé. Je suis soulagée qu’il soit toujours aussi bref. Entendre sa voix dans ma tête durant des heures ne me tente guère, même si un léger murmure me tourmente en tous temps.

Je caresse pensivement une dernière fois les poils recouvrant la paroi, puis m’enfonce dans le sol.

J’ai ma première mission.

Autrice : Jécrivaine, sous le pseudo « Jécrivaine »

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