Minouchka
Il faisait chaud. Trop chaud. La chaleur avait fondu la matière qui collait mes yeux, mais je ne pensais plus à m’en réjouir.
Je pouvais voir des dunes de sable à perte de vue. Nulle part un mur, ou un plafond. Juste du sable.
La porte qui s’èlevait dans mon dos et par laquelle j’étais arrivée commençait à s’effacer, comme un dessin dans le sable sur lequel on souffle. Bientôt, elle eut complètement disparu.
J’étais seule, perdue dans un désert de sable. Je n’étais même plus sûre d’être encore dans le Château.
Un vent se leva, transportant des grains de sable qui m’irritaient les yeux. Bientôt, il devint tempête, et je ne vis pas plus que quand j’étais aveugle.
Je m’enfouis dans le sable, les pattes plaquées sur mes oreilles, la queue enroulée autour de mon corps, en espérant que ça passe bientôt.
Une éternité passa ainsi. Trois heures, trois jours, trois ans… Je n’aurais su le dire. Je sais juste que lorsque je crus que j’allais mourir, lorsque je crus que j’allais lâcher prise et me laisser emporter par le vent, il s’arrêta. Aussi soudainement qu’il était apparu.
Je me levai, crachai le sable que j’avais avalé et regardai autour de moi.
Tout repère que j’aurai pu me fabriquer avait disparu. Les dunes avaient changé de place, grandi, rétréci ou avaient été complètement effacées.
Je me mis en marche. Je devais avancer, chercher une issue. Je n’avais pas le choix.
Le vent soufflait toujours, mais doucement cette fois-ci. Il n’empêchait que j’avais toujours du sable dans les yeux.
Je les écarquillai soudainement, avant de froncer les sourcils de douleur. Un grain de poussière s’était infiltré sous ma paupière.
Je clignai quelques fois des yeux, laissai couler quelques larmes, puis me redressai. Je n’avais pas rêvé, il y avait bien une porte!
Elle se dressait sous le vent, surgissant du sol comme si elle avait été plantée là. Rien devant, rien derrière. Pourtant, j’étais sûre que si je la franchissais, j’aterrirais quelque part.
Je m’élançai vers la porte… Et passa au travers. Je me relevai, la bouche pleine de sable, et fixait le panneau de bois en essayant de comprendre.
Un mirage. C’était un mirage!
Je repartis, pleine de rage, et me remis à marcher. Plus je cherchai des issues, plus les portes s’avéraient être des mirages, plus je m’énervai. Qu’est-ce qui m’avait prise de sauter dans le trou, à la suite de quelques explorateurs que je ne connaissais même pas! Alors qu’on m’avait clairement stipulé de ne m’occuper seulement et uniquement de la mission, et d’ignorer mes envies d’aider quelqu’un, même si j’avais parfois l’impression que j’allais exploser! Maintenant, Bastien et Éliane se retrouvaient seuls, livrés à eux-mêmes, et le sort qui rejetait tous les mauvais coups vers Bastien n’agissait que si j’étais avec eux! Ce qui veut dire qu’il pourrait arriver n’importe quoi à Éliane si je ne les retrouvai pas rapidement… Et s’il lui arrivait quoi que ce soit… Je n’osai même pas penser à ce qu’IL m’infligerait.
Perdue dans mes pensées, je ne les remarquai pas et faillit passer à côté d’eux. Heureusement, je me rattrapai à la dernière minute, et me rapprochai.
Je ne doutais pas que ceci était un mirage. Je les voyais, fixant quelque chose devant eux, un tableau peut-être… Éliane manipulait la chose devant eux, puis se baissa pour ramasser un objet tombé à terre.
La vision disparut, mais ça m’étais égal. Je savais dans quelle pièce ils avaient aterri. C’était dans une pièce immortelle, qui faisait partie de celles à apprendre par cœur. Celle où je me situai à l’instant n’en faisait pas partie, elle disparaîtrai sitôt que je l’aurai quittée. Mais si je réussissai à rejoindre une autre pièce immortelle, je pourrais peut-être les retrouver, en espérant qu’ils ne se seraient pas trop éloignés…
Ma réussite, s’il y en aura une, devra beaucoup au hasard et à la chance, mais j’étais prête à tenter le coup. Il fallait déjà que je trouve la sortie, en attendant…
Peut-être l’exploratrice que j’avais rencontrée durant le combat contre la Créature pourra-t-elle m’aider?
J’effaçai aussitôt cette option de ma tête. Elle devait m’en vouloir. Elle avait compté sur mon attaque, mais j’avais raté mon coup et elle avait été capturée avec ses compagnons. D’ailleurs, je ne savais même pas où elle se trouvait.
Je m’attendais à voir une image d’elle surgir du sable, mais rien. Juste une tache noire, fugitive, qui apparut devant moi une fraction de seconde.
Soit elle était sortie du Château, soit…
Soit elle était morte.
Je me secouai. C’était impossible, impossible! Elle ne pouvait pas être morte, non…
Car si c’était le cas, ça voulait dire que c’était de ma faute. J’avais voulu l’aider, mais par ma faute elle était morte.
Je me retrouviai soudainement trempée. Sans regarder où j’allais, j’avais marché droit vers un oasis.
Je bus sans m’arrêter. Jusqu’à ce que je crus que j’allais éclater comme un ballon trop rempli. Puis je relevai la tête.
De l’autre côté du bassin d’eau se trouvait une porte. Je m’approchai, méfiante, par peur de me heurter à un nouveau mirage, mais la porte était réelle.
Je la poussai du bout du museau et me précipitai au-dehors.
Autrice : La Panthère Qui Ronronnait, sous le pseudo « La Panthère Qui Ronronnait »