Tout au bout du bord de l’extrême, derrière les dernières montagnes du Monde, s’élève le Château des 100 000 pièces Les murailles, et les tours et les étages de ce palais s’élèvent, à ce qu’il vous paraît, bien au-delà des nuages, au-dessus des cimes.
LA PIÈCE DES FÉES… OU D’AIFÉ
LA PIÈCE DES FÉES… OU D’AIFÉ

LA PIÈCE DES FÉES… OU D’AIFÉ

Dvango et Aifé

Je marche seul dans les rues désertes de la ville abandonnée. Elle n’est pas loin, je le sens. Elle
est blessée et son sang me guide. Le Général Maryl a bien fait son travail.
Elle est proche. Très proche. Elle est là, allongée par terre, incapable de sa déplacer. Il y est allé
fort.
« Salut Aifé. »
A ses yeux, je suis un cavalier vêtu de blanc et masqué. Rien de très rassurant. Tant mieux. Se
savoir en sécurité n’aide pas à prendre les bonnes décisions.
« Qui êtes-vous ? »
Elle ne me fait pas confiance. Tant mieux. Elle a beaucoup appris depuis son entrée ici…
« Cela importe peu. Tout ce qui compte, c’est que je sais qui tu es.
– Vous… vous savez… tout ?
– Tout. »
Elle a vite compris. Elle fera une bonne recrue. C’est alors qu’une enfant s’avance.
« Je savais tout, sauf ça. Elle est à toi ?
– Lià ? Qu’est-ce que tu fais ici ?
– Je te cherchais, Aifé. Néo t’a frappée, et après je me suis endormie et après… j’étais ici.
– Il t’a fait mal ? »
La petite détourne la tête.
Pourquoi le Général ne nous avait-il pas parlé d’elle ? Le fourbe reptilien se jouerait-il de nous ?
« Comment suis-je arriver ici ? Répondez-moi !
– Aifé, je ne sais pas. Mais cela ne me concerne pas.
– J’étais avec Néo Maryl, mon Mentor. Où est-il ?
– Bientôt ton Maître sera autre… Tu ne voudrais pas plutôt savoir ce que je peux te proposer ? »
Elle se tait. Elle réfléchit, sûrement.
J’en profite pour observer la pièce. Des ruines. De partout. Rayon aurait dit : voici Pompéi après
le Vésuve, voici Troie après les Achéens. Moi je ne pense que : voici l’embuscade où nous
succomberont tous. Le lieu parfait pour un piège. Ruelles étroites et sombres, cachettes par
milliers.
« Que voulez-vous ?
– Je veux ton bien, jeune Saanp.

– Vous Le connaissez ?
– Peut-être.
– Alors menez-moi à Lui !
– Tu dois être digne de rejoindre notre Hôte »
Elle semble désemparée. Peut-être la marmaille l’a fait changer d’avis ? Si elle ne souhaite plus
Le servir, elle doit mourir.
« Je suis prête à toutes les épreuves.
– Alors tue-la. »
Je désigne de la main la petite « Lià ».
« Non. Je… ne… peux… pas. »
Elle tremble. Elle est pitoyable. Pourquoi le Maître la veut-il ?
« Pourquoi ?
– C’est une enfant. »
Je vais devoir L’appeler. Il sera… très mécontent. Je m’éloigne.
« Maître ? Il y a un enfant. Une enfant.
– Bien. Demande-lui de la tuer.
– C’est fait. Elle refuse.
– Je suppose qu’elle le mérite ?
– Elle ferait une bonne recrue.
– J’arrive. Attends-moi.»
Je me retourne vers Aifé. Elle a les yeux pleurant, le corps sanglotant mais elle continue de
protéger Lià. Tant de volonté et de force devrait nous revenir.
Tourbillon noir. Silence pesant. Nuit qui tombe. Ouragan.
« Aifé, Je suis là.
– Le… le Château !? »
Je vois le silence l’oppresser. La mettre mal à l’aise. L’odeur de sang et de pouvoir qui suinte de
notre Seigneur n’y est pas pour rien.
« Je ne la tuerai point. »
Il continue de se taire. Je suppose que la stratégie du double-jeu peut toujours fonctionner.
« Les sentiments sont une faiblesse. Tu n’es pas digne de l’Ordre, de notre Seigneur.
Tu es faible !!! »
Elle se recroqueville sur elle-même.
« Je. Ne. Suis. Pas. Faible !!! »
Elle hurle. La tempête qui fait rage depuis l’arrivée du Château étouffe en partie sa colère.
C’est à Lui de jouer, maintenant.
« Tu n’es pas faible, mon enfant…
– Je ne suis pas votre « enfant » !
– Tu n’es pas faible tant que tu te bats. La morale, le Bien et le Mal sont des inventions
humaines. Au final, il ne restera que nos actes et nos paroles, que des roses et des orties. Fleurs
qui se fanent jusqu’à ce que l’on disparaisse totalement, dans les cœurs et les esprits.
Il n’y pas de mal à tuer un enfant. Il n’y a pas de mal à tuer tout court. Ses barrières que l’on se
fixe ne sont rien. Dépassent les et rejoins moi. Viens voir ce monde de plus haut. Tu es des
nôtres, que tu le veuilles ou non.
Tue-la. Qu’est-ce que la mort ? Rien, ou peu de choses. Elle finira par mourir et ce monde n’est
pas le sien. Abrège ses souffrances, c’est ce que tu peux faire de mieux. »
Elle jette des coups d’œil à mon Maître puis à Lià. Elle ne sait plus quoi faire.
« J’aurais une autre proposition, mon Seigneur, si vous permettez.
– Vas-y, J’écoute.
– Aifé, confie-la moi. Elle rejoindra nos rangs, comme toi. Elle vivra. Mais elle obéira, subira. Elle
deviendra plus forte que tu n’oses toi-même espérer l’être.»

Dilemme : une mort rapide et sans douleurs, une vie longue mais dangereuse, une vie à servir.
« Elle n’est pas à vous. »
Tout à coup, dans un éclair, Lià disparait. Il ne faut jamais Le mécontenter. Elle hurle, et ses cris
retentissent longtemps dans le village fantôme, plus longtemps encore dans le cœur d’Aifé. Elle
aura toujours ces cris sur sa conscience.
Le Château saisit brusquement le bras d’Aifé et se téléporte. Je les suis, satisfait. Elle sera un
bon élément.

Autrice : Shvimwa, sous le pseudo « Shvimwa »

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