Cléclé as Cléclé
Il n’y eut d’abord que le noir. Longtemps, trop longtemps. Ou alors trop à mon goût.
Ce fut une légère brise qui me réveilla. J’étais enroulée dans une grande couverture de velours noir et je constatais avec plaisir que mes vêtement brûlés avait été remplacés par d’autres qui provenaient de mon sac-à-dos – que je n’avais plus.
J’essayai de me lever et une multitude de brûlures me laminèrent les jambes, les bras ainsi que le dos et les pieds. Je me retins à un arbre. Alors seulement, je détaillai le paysage qui m’entourait.
Des multitudes d’arbres aux feuilles rouges se chevauchaient, le parterre était jonché de ces dernières, de châtaignes et de champignons et le ciel d’un gris souris qui contrastait totalement avec les couleurs de la forêt. Tout cela sur des montagnes escarpées sans fin.
J’avançais contre le vent, faisant craquer les feuilles à chaque pas, mes cheveux aux boucles rousses voltigeant tout autour de moi, blottie dans mon sweat à capuche, avançant au hasard, je le remarquai enfin. Tout en haut d’un arbre, une sorte de corbeau, mais de plusieurs couleurs.
– Withraven !
L’oiseau descendit vers moi mais il semblait nerveux. Il se dégagea de mes bras et vola vers une fumée épaisse que je remarquai juste. Je le suivais.
– Eoooooh ! Où tu vas ?
La fumée provenait en fait d’un feu de camp autour duquel étaient attablés Marine, Yashim et …
– Romain !!!
Je me jetais dans ses bras par soulagement.
– Tu es vivant… Il est vivant… Il semblait surpris, mais cela ne dura pas longtemps et il m’enlaça lui aussi. Enfin, je me dégageai de ses bras.
– Romain, j’ai cru que tu était mort ! Il rit aux éclats.
– Moi aussi tu sais…
Je fus bousculée par Marine qui revenait de sa stupeur et qui se jeta à mon cou.
– Astrid ! C’est génial ! Je sursautai.
– Et bien quoi ? Je t’ai fait peur ? Je ne savais pas que j’avais une tête aussi horrible tout de même ! Je lui fis signe de se taire. Un froissement de feuilles dans les buissons et je me jetai dessus, un bâton à la main. J’eus tôt fait de me battre avec un ennemi que je ne voyais pas, caché par les buissons. Mais très vite, je prenais l’avantage et sortis du buisson…
– Qu’est ce que tu fais là, gamin ? fit Yashim.
Un garçon de 7 ou 8 ans blond, plein de blessures infectées se tenait devant nous, fier comme un coq.
– Je m’appelle Frank, je suis entré dans le château comme vous. J’ai 7 ans, presque 8… Mais ch’uis fort, hein ? puis se tournant vers moi :
– Toi je t’ai presque battue, même si t’as gagnée ! Et puis, je suis un vrai p’tit gars comme dirait papa, alors j’avoue la défaite !
Yashim le regarda, interloqué :
– Tu te crois où ? Ce château n’est pas un jeu ! Il faut que tu reviennes parmi nous Frank ! T’as pas tenu une minute contre Astrid ! Regarde comme tu es blessé, tes blessures sont importantes, s’infectent et si ça continue comme ça, tu vas mourir ! Je comprends pas qu’on ai laissé un gamin comme toi passer la porte du château ! Seul en plus !
– Il n’y avait personne pour surveiller ! Et puis je n’étais pas… Il tomba par terre comme une masse.
Marine le regarda avec un air gêné :
– Super, on en fait quoi ? Parce que là, il est pas en très bon état.
– C’est la fièvre des blessures qui s’infectent, qui l’a fait tomber dans les pommes, dit Romain.
Frank se réveilla un instant.J e me penchais pour mieux entendre ses paroles.
– F… Faites atten… tion… a… aux…
Je le secouai comme une prune.
– Aux quoi ? Aux quoi ? Réponds bon sang ! Yashim m’attrapa par les épaules – et me fit rougir une fois de plus – pour me calmer. Malgré tout, je devinais la suite de la phrase de Frank car 3 monstres difformes nous sautèrent dessus. Marine grommela :
– Mais qu’est-ce qu’il font là, eux ? puis elle me chuchota à l’oreille :
– Je reste à protéger Frank, toi vas-y extermine-les ! Mais je ne savais que trop bien que ce ne serait pas aussi facile. Tout de suite, j’assommais le premier. Le deuxième sortit un épée et la pointa vers moi tandis que le troisième menaçait Yashim et Romain. J’esquivais facilement son premier coup et attrapa en même temps un gros bout de bois solide pour le combattre et lui lançai moi aussi un coup solide. Un sourire se dessina sur le visage du monstre, cruel, qui se remplaça aussitôt par une grimace en voyant son compagnon tomber, impuissant sous les deux garçons. Je profitais de cet instant d’impuissance, le mis par terre et lui glissai sa propre épée qui était tombée par terre sous le menton. Le temps s’arrêta autour de nous.
– Fais ta prière, je vais te tuer ! fis-je, triomphante.
Une voix grave et rocailleuse retentit dans ma tête.
Vas-y je t’en prie, fais-toi plaisir !
Je lui appuyai plus fort l’épée et il se mit à saigner, mais ma main tremblait, incapable de m’obéir.
Tu n’o-se-ras paaaas ! chantait la voix dans ma tête. Ma main tremblait de plus en plus. Le temps était revenu à la normale, un bruit sourd de masse qui tombe par terre retentit, je lève l’épée mais n’arrive pas à la baisser…
Romain m’arrache l’épée et la plante dans le cœur du monstre qui étouffe un bruit sourd.
– Romain… ma voix était tremblante.
Alors seulement je remarque le cadavre du premier monstre que j’avais assommé, derrière moi, une dague à la main… Romain m’avait sauvé la vie ! Mais sa façon froide de les tuer m’avait donné des frissons.
– On ne s’attarde pas içi, décida Romain. Whithraven se posa sur son épaule.
– Suis-nous, la porte est là-bas, me dit Marine en me désignant un porte qui flottait dans le vide. Je les suivais sans rien dire, mais au dernier moment, celui où on passait la porte, je soufflai à Romain :
– Merci.