Louvelo as Louvelo
Je m’effondrai sur le sol au moment où je poussai la porte, laissant derrière moi les enfants carnivores. Haletante, mon esprit rempli de leurs dents pointues et de leurs yeux affamés, je tentai de reprendre mon souffle. Papergirl, à côté de moi, n’était pas en meilleure forme. Un liquide écarlate coule de ses blessures, ruisselant le long de ses membres transparents. Son visage exprime la douleur, l’incompréhension.
Je m’approche un peu, lui souriant faiblement.
– Bah, on dirait que même les fantômes peuvent saigner …
– Oui, on dirait, réplique-t-elle, sa voix entrecoupée par la douleur.
Je soupire, essuyant le sang chaud et poisseux qui macule ma jambe.
– Peut-être que j’ai quelque chose qui… fis-je, fouillant dans mon sac.
C’est alors que je me souviens de l’eau de la fontaine. Je plonge ma main dans mon sac, cherchant fiévreusement la solution à tous nos problèmes. Je ressors ma main du sac quelques secondes plus tard, victorieuse. Je tiens ma gourde, qui renferme de l’eau aux propriétés de guérison.
Je tends la gourde à Papergirl, souriante.
-Tiens, verses en sur tes plaies.
Elle obéit. Sa main tremble un peu, mais l’eau ne tarde pas à guérir ses blessures. Elle regarde avec émerveillement ses blessures qui se referment, laissant à la place une peau – transparente – fraiche et neuve. Ses traits se détendent.
Elle sourit de soulagement, et me tends la gourde. Je verse à mon tour du liquide sur mes jambes. Je me sens mieux, tout à coup…
Puis nous nous relevons, et inspectons la pièce.
Mais, apparemment, le château avait décidé de ne jamais me faire plaisir.
Parce que la pièce était un laboratoire.
Je sentis un courant glacé courir le long de ma colonne vertébrale. L’odeur de produit chimique dans l’air réveilla trop de souvenirs en moi. Je frissonnai, sur le bord de l’évanouissement.
Papergirl du remarquer mon air pâle et mes jambes tremblantes parce qu’elle murmura :
-Louvelo ? Ça va ?
Je ne pus répondre. Dans mon esprit s’entrechoquaient des images du passé.
Une petite fille. Attachée sur une table. Un homme. En blanc. Une longue blouse blanche. La pièce est blanche. L’air sent le désinfectant. La petite fille frissonne. L’homme se penche vers elle. Il a un grand sourire. Sa main se tend. Il tient une seringue dans sa main. Une seringue remplie d’un produit noir. L’aiguille s’approche du bras de la fillette. L’homme la plante dans son bras. Elle hurle, tremble. Le liquide se déverse dans ses veines. L’homme part. La pièce est plongée dans les ténèbres. La petite fille est seule.
Je reviens à moi. Papergirl me secoue.
-Louvelo ??
Je respire lentement, me tourne vers elle.
-Ça va.
Je sais qu’elle ne me croit pas. Mais elle ne dit rien d’autre. Je lui lance un sourire reconnaissant. Puis je me tourne vers la pièce, tentant de surmonter ma peur. La pièce est blanche. Une table est installée au milieu, blanche aussi. Une table d’opérations, avec des sangles en cuir au niveau des bras, des jambes, et du cou. Sur un comptoir, à côte, sont installés toutes sortes de fioles, contenant des liquides colorés. À côté, une multitude de seringues.
Les images reviennent. Un nouvel éclair de douleur transperce mon crâne.
La petite fille ouvre les yeux. Elle a mal. Mal. Mal. La douleur occupe son esprit, omniprésente, brouille sa vision. Une main, dure, la secoue.
-Réveille-toi !
Je reviens à la réalité. Une main me secoue.
-Louvelo !!
-Désolée, je bougonne.
Je me redresse. Le laboratoire n’a pas bougé.
Tout se passe en un éclair.
Je vois une main se plaquer sur le visage translucide de Papergirl. J’ouvre la bouche pour la prévenir.
Une main se plaque sur mes yeux. Une main dure. Qui sent le désinfectant. Une autre main couvre ma bouche.
Je sens la morsure d’une seringue contre ma peau. Je hurle.
Je tente de me transformer en Louve, je tente de donner des coups de pieds, de frapper, de griffer, de mordre….. Impossible. Je ne peux pas bouger.
Une vague de panique me submerge.
Je sens qu’on me transporte… Une porte. J’aperçois un éclair de bois, un morceau de poignée entre les doigts de l’homme qui me porte. La porte claque derrière moi. Nous sommes sortis du laboratoire.
Je sens qu’on m’assoit. On attache mes poignets.
Enfin, l’homme enlève sa main de mon visage…