Lutter contre le vent et rire avec la nuit as Lutter contre le vent et rire avec la nuit
J’ai longtemps hésité avant de franchir le seuil tremblotant de cette pièce perchée au sommet d’une tourelle de glace du château. Cette pièce avait l’air si étrange. Elle me donnait, sans que je sache pourquoi, l’envie de m’enfuir mais me murmurait d’entrer sans crainte. J’ai finalement fais un pas en avant.
Pour tomber dans un gouffre sans fond, d’un or aveuglant. Pour murmurer « La vie est si belle lorsque l’on meurt… ». Pour m’endormir alors que la vitesse que mon corps subissait dans sa chute allait en s’accentuant toujours plus. Pour ouvrir les yeux sur d’innombrables miroirs ondulant comme une eau troublée. Pour me sentir assoiffée alors que je nageais dans une eau claire et que des gouttes translucides perlaient sur mon visage. Pour me sentir tractée vers le bas, alors que j’étais transportée dans les airs.
Et puis j’ai eu un sursaut. Enfin, pas moi. La pièce. Elle s’est mise à tourner, à fondre, à se tordre, tandis qu’un sol de verre d’une transparence irréelle se glissait sous mes pieds. J’ai crus percevoir un sanglot. Une tristesse d’une intensité si grande qu’elle semblait émaner de six cents individus à la fois secoua mon corps. La pièce s’est immobilisée et s’est teintée de bleu. Un bleu qui imitait parfaitement celui de l’océan. Une baleine a jalli de l’eau, m’envoyant une gerbe d’écume. Où étais-je ? Impossible d’être dans une pièce, dans un lieu autre que le pont d’un navire. Et pourtant. Une brume s’est étalée brusquement à la surface de l’eau, masquant tout à mes yeux, m’enveloppant de froideur. Je me suis réveillée. Sur mes pieds. Dans une pièce de glace. Dans l’unique pièce de la plus haute tour du château. Je suis sortie en chancelant. La porte s’est fermée. Et j’ai sentis un souffle d’une force inimaginable filtrer de sous celle-ci. Quand j’ai voulu par curiosité rouvrir le lourd bâtant de glace ornée de fer forgé, je n’ai pas pu la faire bouger d’un milimètre. Impossible de l’ouvrir. À se demander si elle s’était ouverte un jour.