Je tombe à plus ventre sur le sol. Je vois en gros plan le parquet recouvert d’un riche tapis. Il est clairement vieux, il dégage cette odeur caractéristique des objets anciens qui rappellent le salon de grands-parents. Celui-ci est d’un rouge riche, avec des motifs aux couleurs fanées qui forment des entrelacs infinis. Je contemple les fils effilochés par les nombreux pieds qui sont passé dans cette pièce.
Un peu remise de ma chute, je cherche à voir où je suis tombée. Je me relève, avec une légère douleur : j’aurais sûrement des bleus demain. J’observe autour de moi et je découvre une belle bibliothèque de style vieil européen. Je sens ce charme intemporel d’une pièce chaude et confortable, avec son aura de vieux savoir, de bon café et de discussions pour refaire le monde autour d’un jeu de cartes. Une table d’acajou est une belle pièce au milieu du tapis, mais pas comparable à la beauté simple mais évidente des meubles de bibliothèque eux-même. Ils couvrent trois des murs de cette pièce de taille moyenne, d’une hauteur de taille au plafond. Beaucoup de livres à l’aspect usé et à l’odeur de vieux livre qui est tellement recherché par les bibliophiles couvrent ses étagères, parsemés de différents petits object. Un globe, un avion miniature en plomb, un petit croquis dans son cadre, une lettre écrite au stylo plume, une montre à gousset, une vieille pipe qui pourrait appartenir à un magicien gris dans une terre lointaine, un ensemble de bibelots merveilleux.
Je me retourne et trouve sur le sol un livre ouvert. J’observe sa couverture : le titre est « Légendes Inuit ». Je réfléchis et la raison de ma chute m’apparait. Serai-je tombé du livre? Ce Château est définitivement étrange.
Mais mon instinct de lectrice prend le dessus, et je m’avance vers les histoires merveilleuses qui m’attendent. Dans les combinaisons de 26 lettres, 35 000 mots français, une immensité d’autres dans toutes les langues, une infinité de mondes se créent. Ces histoires de papier ont été ma cachette pour me protéger du monde depuis que j’ai appris à déchiffrer. Déchiffrer, come si lire était craquer ce code du monde adulte. J’ai souvent lu après mon couvre-feu, à la lampe poche sous les couvertures. Ou en été, faisant l’école buissonnière quand les moqueries étaient trop fortes, allongée dans les prés. J’ai récupéré des livres en me faisant petite, en fouinant dans tout les recoins de la ville, récupérant des informations sans en avoir l’air. Se faire oublier des adultes par mon attitude folle et étrange. Et toujours ce refuge de papier, qui même dans ce Château si loin de ma terre de naissance, m’accueille.
Ici, la magie du Château augmente celle des caractères d’imprimerie, et je m’enfuis corps et âme dans le monde du premier ouvrage à ma portée.
Ambre n’est plus Ambre, mais un poisson dans son océan de lettres.
Je vis dans les livres
Je suis un poisson
d’argent
Auteur : Sintara sous le pseudo « Sintara »