Tout au bout du bord de l’extrême, derrière les dernières montagnes du Monde, s’élève le Château des 100 000 pièces Les murailles, et les tours et les étages de ce palais s’élèvent, à ce qu’il vous paraît, bien au-delà des nuages, au-dessus des cimes.
LA PIÈCE DE L’ÉCHO
LA PIÈCE DE L’ÉCHO

LA PIÈCE DE L’ÉCHO

Bastien

La porte d’où nous étions arrivés se situait sur le sommet d’une colline surplombant une plaine, avec, au fond, une petite forêt.
Éliane se précipita aussitôt au-dehors, un sourire malicieux sur les lèvres. J’allais lui demander ce qu’elle faisait lorsqu’elle se pencha en avant face à la plaine avec la forêt, et hurla de toutes ses forces.
Un écho renvoya son cri une fois, trois fois, cinq fois.
Elle recommença. Encore et encore, elle hurla, poussa des cris de joie jusqu’à ce que l’écho ne puisse plus que rendre des cris brouillés, jusqu’à ce qu’elle s’écroule sur le dos sans souffle, épuisée, mais le sourire aux lèvres.
Charlie s’était écartée d’elle, l’air inquiet. Il ne comprenait pas ce qui prenait Éliane de hurler comme si on l’écorchait vive.
Elle le remarqua, et lui dit:
-Essaie! Ça fait un bien fou, tu verras.
Il s’approcha du bord, hésitant, puis lança un timide „Hého!“ que la montagne lui rendit, avec le même son timide. Il sourit. Puis il réessaya, avec plus d’entrain cette fois, et il finit par éclater de rire.
Un rire joyeux, cristallin, qui roula sur la plaine devant nous, heurta la forêt puis revint, sans avoir changé de ton. Éliane, qui avait récupéré, se joignit à lui. Ils rirent sans s’arrêter, pendant de longues minutes, avant de s’allonger dans l’herbe.
Je restai à l’écart. J’étais heureux de les voir ainsi, de retrouver l’éclat enfantin das leurs yeux, celui qui avait été effacé par les épreuves du Château, mais…
Mais quelque chose pesait sur ma conscience. Plusieurs choses, en fait.
Par exemple, mes souvenirs d’avant le Château. J’avais remarqué dans la pièce au verre d’eau que je n’arrivais plus à me souvenir de ma vie passée, comme si elle avait été effacée. En réfléchissant un peu, j’avais réussi à me remémorer une pièce sombre, sans sol, sans murs, sans plafond, avec un coffre vide… J’imagine que c’est là que j’avais perdu mes souvenirs.
Il y avait aussi les visions. Dans la pièce 1000, j’avais prédit de quelle façon le Château allait attaquer, sans avoir la moindre idée de comment je savais ça. Dernièrement, j’avais même eu une autre vision…
Je frissonais rien que d’y penser. Ça ne voulait sûrement rien dire, c’était un simple rêve ou une pensée perdue… Je ne devais pas y faire attention.
Éliane, qui avait arrêté de rire, se tourna vers moi:
-Bastien, essaie aussi! T’es tout crispé, ça va te détendre.
J’obéis, et hurlai sans m’arrêter, tout en écoutant l’écho. Un court instant, j’oubliai tout, visions, souvenirs manquants, dans ce cri sans fin, ce cri salvateur et libérateur, tandis que Charlie et Éliane se joignaient à moi.

Autrice : La Panthère Qui Ronronnait, sous le pseudo « La Panthère Qui Ronronnait »

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