Tout au bout du bord de l’extrême, derrière les dernières montagnes du Monde, s’élève le Château des 100 000 pièces Les murailles, et les tours et les étages de ce palais s’élèvent, à ce qu’il vous paraît, bien au-delà des nuages, au-dessus des cimes.
LA PIÈCE OÙ LA POMME EMPOISONNÉE DEVIENT UN ŒUF EN CHOCOLAT
LA PIÈCE OÙ LA POMME EMPOISONNÉE DEVIENT UN ŒUF EN CHOCOLAT

LA PIÈCE OÙ LA POMME EMPOISONNÉE DEVIENT UN ŒUF EN CHOCOLAT

Ecrite en écoutant Electric Angel, de Kagamine Rin.
Aifé

-Aifé! Regarde!
Lià court dans la pièce, sautille d’excitation. Et, à son âge, je la comprends. La pièce est grande, le plafond peint d’un bleu ciel, en trompe l’œil, des nuages dessinés ici et là. De l’herbe tendre recouvre le sol. Des buissons par endroit, deux ou trois arbres en fleurs, un ruisseau, et un superbe soleil dessiné qui réchauffe mon visage. Lià me rejoint, en courant, un objet brillant dans la main.

-Tu as vu? C’est du chocolat! Je n’avais pas fait la chasse aux œufs depuis 3 ans! Depuis que je suis rentrée ici! C’est génial!

Je m’accroupis pour être à sa hauteur, et murmure.

-Le Château ne t’as jamais emmenée à la fête de Pacques?

-Non. Il disait que ce n’était pas bien.

-Je comprends… Retourne toi, il y a une poule en chocolat, sous ce buisson…

Elle se retourne, et court en riant jusqu’au buisson. Pourtant, je la vois revenir avec une cloche en chocolat blanc, et un lapin doré sous le bras en plus.

-Tu veux bien me les garder? Merci Aifé! C’est génial!

Sa joie de vivre me réchauffe le coeur. Je dépose ses trouvailles à mes pieds, et la regarde courir, chercher des œufs à travers la pièce. Je ne comprends pas ce que je ressens pour elle. Pourtant, j’ai envie de la protéger, de la sauver des dangers du lieu, de la voir sourire, rire, de sécher ses larmes si elle en avait. Elle revient vers moi, pour déposer d’autres œufs sur le tas formé. Je souris, en la voyant s’accroupir, ramper sous les buissons, grimper aux arbres pour attraper des oiseaux de chocolat, les faire tomber à terre, et sauter à son tour, pour les ramasser. Je ne comprends pas pourquoi, je en l’ai pas tuée, en la voyant. Je sais que je ne tue pas d’enfants, mais je sais aussi qu’elle est mon point faible. Elle est bien trop naïve.

Je me demande ce qui lui arrivera, si j’arrive à rejoindre les rangs du Château. Peut être la tuera t-il tout simplement? Je souhaites sincèrement que non. Au mieux, elle pourrait rejoindre la quête du Château avec moi. Pourrais je renoncer à mon rêve, juste pour elle, à ma seule raison de vivre?

Un cri de joie raisonne, et j’immerge brusquement de mes pensées.

-Tu en veux?

-N’y goûtes pas!

Trop tard. Lià a croqué dans le morceau de chocolat, sans même se soucier de savoir s’il était comestible. Habituée à manger la nourriture offerte par le Maître des Lieux, elle ne s’était même pas doutée qu’il était empoisonné. Elle tombe à terre, à quelques mètres de moi. Je cours la rejoindre, m’agenouille auprès d’elle.

-Lià! Tu vas bien?

Elle tremble, secouée de spasmes incontrôlables. Ses yeux terrifiés me fixent. Elle demande.

-Aifé! J’ai… J’ai mal! Qu’est ce qui se passe?

Je me rends compte que ma voix énervée et anxieuse l’a effrayée à son tour. Je prends une voix rassurante, et murmure.

-Rien, rien… C’est certainement passager. Tout va bien…

-Non!

Elle tousse, maintenant. Je la force à s’assoir, lui tape dans le dos. Un mince filet de sang s’échappe de sa bouche. Par instinct et réflexe, je l’allonge sur le dos, oppresse sa poitrine, puis la relâche. Mon intervention l’aide à respirer, ses voies respiratoires ne sont plus obstruées.Cependant, ses tremblements ne cessent pas pour autant.

-Calme toi Lià. Tout va bien.

Je tente de la rassurer, de l’apaiser. Mais en ce moment, Lià est comme un animal craintif. Elle sent ma peur, et comprend tout.

-Je vais mourir!

-Bien sur que non… Écoute moi bien Lià. Je… crois que tu as été empoisonnée. Mais ne t’inquiète pas. Tu vas guérir.

-Ce n’est pas vrai…

La gamine a beau être naïve, elle ne s’est pas laissée avoir par mon mensonge. J’oppresse, sa poitrine plus fort encore. Je tente vainement de ne pas entendre ses pleurs. Je saisis un tube de ma poche, et verse le contenu dans sa gorge. J’enlève ma main de sa poitrine. Elle inspire, tousse, et hurle de douleur. Elle se débat, tente d’échapper à mon emprise.

-Je suis désolée Lià!

Elle produit des sifflements stridents, pleure des larmes de sang. Il me semble que ses râles de douleur s’entendent dans tout le château. Ses pupilles se dilatent.

-Je sais que les humains n’en consomment pas habituellement, mais c’est le seul moyen!

-Je veux mourir!

-Calme toi! C’est normal! La substance est très forte! Tu iras mieux après.

Elle s’évanouit de douleur. Elle ne respire plus. J’appuie sur son ventre, violemment. Sa respiration reprend, sifflante d’abord, puis presque indétectable. Je lève la tête. La pièce est telle qu’elle était lorsque nous sommes arrivés. Je ne peux m’empêcher que c’est triste pour la gamine que son premier Pacques depuis quelques temps soit le jour d’où elle gardera un souvenir horrible.

Je me relève, et la prend dans mes bras. Elle semble si vulnérable, ainsi. Je m’avance, dans la pièce, et sors par la porte dissimulée derrière un buisson. Je sais le danger écarté. Je murmure, à la petite, bien qu’elle soit inconsciente, tandis que nous passons la porte.

-Tiens bon Hachûnui. Tiens bon…

Autrice : Jécrivaine, sous le pseudo « Jécrivaine »

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