Tout au bout du bord de l’extrême, derrière les dernières montagnes du Monde, s’élève le Château des 100 000 pièces Les murailles, et les tours et les étages de ce palais s’élèvent, à ce qu’il vous paraît, bien au-delà des nuages, au-dessus des cimes.
LA PIÈCE TRIANGLE
LA PIÈCE TRIANGLE

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LA PIÈCE TRIANGLE

Enfant des mers as Enfant des mers

En entrant dans la pièce, je me baissais afin d’éviter Merlin qui arrivait un peu n’importe comment. Il battit deux-trois fois des ailes avant de retrouver son équilibre et de planer sous le plafond, à plus de trente mètres de hauteur. Depuis ma plus tendre enfance, j’ai toujours admiré le vol silencieux et gracieux de ces oiseaux de proie. Et leur plumage brun, leur ailes puissantes qui les propulsent dans le ciel… Ils sont juste magnifiques.
–Hé, Sara, tu viens ou pas ? Tu as fini de contempler Merlin ?
Miri s’était arrêtée pour m’attendre, et j’allongeai le pas. Mes pieds frôlaient un épais tapis rouge –ce qui, avouez-le aurait dû faire « tic » dans ma tête–. Sur les trois murs que contenait cette pièce (qui était triangulaire), quelqu’un avait peint de gigantesques fresques représentant tous les peuples du Château. Il y avait là des humains, principalement, mais aussi des elfes, des fées, des Esprits, des fantômes, des nains, des géants, et toutes ces créatures les plus improbables les unes que les autres. Chaque peuple était associé à d’autres personnages, si bien qu’il était assez difficile de savoir où finissait quoi. Chaque peuple avait été dessiné en bleu, vert ou rouge. Ils semblaient répartis selon un ordre précis qui m’était cependant inconnu. Je sentais, plus que je ne voyais, le lien que représentait toutes ces couleurs : un lien fort et unique, imbrisable.
Mes yeux sautaient d’images en images, de symboles en symboles, s’arrêtant sur des créatures mythiques et sur les légendes de mon peuple. Je regardai un korrigan s’élancer avec bravoure, décelant dans ces mouvements un infime tressaillement.
Ce fut bientôt à mon tour d’attendre Miri. Elle regardait avec admiration les tableaux tissés à même le mur qui lui souriait comme on sourit à un pair. Elle était aux anges, au milieu de l’Histoire, de la peinture et des Trois déesses korrigane.
Tellement à l’aise qu’elle serait morte si je ne l’avais pas poussée juste à temps pour l’éloigner de la lance verte qui lui était destiné. Je me retournais avec effarement, mais je ne pu voir… M**de. Sh*t. Les fresques étaient vivantes. Évidemment. Pourquoi ne m’en étais-je pas rendu compte plus tôt ? J’essayai d’évaluer notre situation, mais impossible. Il y en avait trop. Tous les personnages sortaient de leur cadre et se mettait à vivre. Restait à savoir s’ils étaient des fantômes, des spectres ou des vivants. Si c’était des fantômes, aucun problème. Ils ne peuvent toucher que ce qui est immatériel. Si c’était des vivants, il y en avait beaucoup, mais au moins j’avais une chance de les tuer, avec Miri à mes côtés. Peut-être pas tous, mais une majorité. Mais si ils étaient des spectres, alors j’étais dans la bouse de traduc jusqu’aux genoux (pour ne pas dire autre chose).
Mais avant que je ne puisse m’attarder plus longtemps sur nos chances de survie, je me retrouvais soulevée du sol, Miri avec moi. Et le plafond se rapprochait à une vitesse ahurissante. Quand le choc se fit inévitable, je fermai les yeux.

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