Miss Lovegood as Miss Lovegood
Nous entrâmes dans une nouvelle pièce. Très lumineux et très vaste, cet endroit ressemblait à un zoo abandonné. Les enclos étaient vides et les vitres étaient parfois cassées. Nous avançâmes. La billetterie et la boutique souvenirs étaient condamnées, les volets fermés et les ports verrouillées.
-Je n’aime pas trop cet endroit, commenta Poussière d’étoiles, j’ai l’impression que les fantômes des anciens animaux sont encore là.
-C’est étrange, on ne m’avait jamais parlé de ce zoo, dit Om, pourtant je connais parfaitement cet étage.
-Peut-être a-t-il été abandonné depuis des milliers d’années, bien avant votre arrivée au Château, suggérai-je
-Peut-être, répondit-il simplement
Nous nous promenâmes sur les sentiers caillouteux. Nous passâmes à côté d’une ancienne mare asséchée, dont il ne restait plus que quelques coquillages éparpillés, témoignage du passé. Un panneau indiquait «otarie» et «léanis» et deux photos illustraient ces noms. Je reconnu l’animal représenté sur le premier cliché, mais le deuxième m’était totalement inconnu.
-Qu’est-ce que c’est, un léanis ? demanda Poussière d’étoiles à Om
-C’est une sorte de croisement entre un hippocampe et une baleine. Cette espèce n’existe que dans le Château, puisque son créateur vit ici. C’était un scientifique spécialisé dans le domaine animal que je connaissais bien. Il était charmant, rieur, mais est mort lors d’une expérience.
Depuis qu’il était avec nous, Om ne cessait de nous apprendre de nouvelles choses sur le château et les personnes qui y vivaient, et durant ces moments, je réalisais à quel point nous étions petit par rapport à ce gigantesque édifice, et parfois, j’enviais même Om de connaître autant de monde. Je voulais moi-aussi rencontrer ces personnes, vivre des tas d’aventures ici et les raconter ensuite.
Je continuai d’avancer suivi par mon amie, l’Ombre et Ara. Nous passâmes devant l’enclot des girafes, et arrivâmes devant une haute montagne sur laquelle reposait auparavant un lion, le seul du zoo d’après le panneau. J’entendis alors un faible rugissement, sûrement le fruit de mon imagination.
Nous nous arrêtâmes ensuite devant une cage qui abritait des singes, et cette fois encore, leurs cris résonnèrent en moi, se mélangeant avec le rugissement du lion. Cela me fit un peu peur. Je me tournai vers Poussière d’étoiles.
-Tu… tu entends toi aussi ? me demanda-t-elle
J’opinai du chef.
-Je n’aime pas du tout cet endroit, répéta-elle, je préfèrerai partir le plus vite possible d’ici. J’ai l’impression d’être dans un zoo fantôme, composé d’animaux invisibles qui rugissent dans mes oreilles, juste pour me faire paniquer.
-C’est exactement ce que je ressens, répondis-je.
Nous continuâmes notre chemin, jusqu’à arriver devant le pré des vaches.
-Mais ! m’écriai-je, c’est idiot de faire un enclot pour des vaches ? Il y en a partout !
-En France, certes, mais ici elles sont très rares et précieuses. On fait même du commerce avec elle, répliqua Om.
J’éclatai de rire, sous le regard étonné de l’Ombre et d’Ara. Il n’y avait que Poussière d’étoiles qui riait avec moi, en imaginant des vaches précieuses.
Comme pour les deux animaux précédents, j’entendis des meuglements, très doux et lointains. Mais ils augmentèrent rapidement de volume, et bientôt les vaches me crièrent dans les oreilles. Sans réfléchir, je me mis à courir, pour m’éloigner du champ. Je passai devant l’enclot des moutons, et leurs beuglements s’ajoutèrent aux sons du lion, des singes et des vaches. Je continuai tout de même à courir jusqu’à ce que je fus contraint de m’arrêter. Il m’était impossible de bouger, désormais, car je sentais que le moindre cri supplémentaire exploserait mes pauvres oreilles. Il n’y avait malheureusement aucune porte en vue, aucun moyen de stopper ces hurlements incessants, qui continuaient de s’amplifier.
Je regardai autour de moi. Poussière d’étoiles était restée devant la cage des perroquets, et nous nous fixâmes un instant. J’avais envie de lui parler, mais je doutais qu’elle n’entende le moindre mot. Je réfléchis quelques secondes. Il était hors de question que je fasse un pas de plus, mais je pouvais par contre reculer, et cela pourrait peut-être effacer les hurlements. Je tentai donc, mais repasser devant les enclos ne fit qu’augmenter le son. Je continuai tout de même à courir jusqu’à arriver devant la porte d’entrée. Je remarquai alors qu’Ara, Om et Poussière d’étoiles m’avaient suivi. Je m’apprêtai à ouvrir la porte, mais Poussière m’indiqua d’un mouvement de tête l’issue de secours.
«Bien sûr ! pensai-je, nous ne pouvons pas entrer et repartir par la même porte !»
Poussière d’étoiles l’ouvrit, laissa passer Om, Ara et moi, puis s’engouffra à son tour. Au moment où elle referma la porte, les hurlements des animaux fantômes s’arrêtèrent.