La Nébuleuse as La nebuleuse.
J’entrai dans l’immense clarté. J’apercevrai, sur une fenêtre à ma gauche le ciel vivifiant. Je devais me trouver à une hauteur exemplaire, tant le sol me paraissait loin. Au loin, je voyais les pics du Zainadir. Je devais me trouver à l’Est du château, dans une des tourelles sombres.
Après que mes yeux fument accoutumés à l’immense clarté, j’aperçus nettement une statue de marbre, un tissu pourpre sur l’épaule. C’était une femme d’une infinie beauté, ses yeux, sculpté doux et vif, semblait languis d’attendre. Ses cheveux de pierre semblaient doux comme la soie, coulant jusqu’au sol comme une immense cascade. J’admirai pendant quelques minutes ce trésor pour mes yeux. Sa bouche était charnue, son nez fin et doux. Les courbes de son visage affichaient une mine de lassitude impromptu. En m’approchant de plus près, je remarquai dans sa main une feuille vermeille, écrit d’une jolie écriture violette. Je n’osai d’abord pas la saisir, admirant concentriquement les mains gracieuses de cette statue de l’oubli. Mais un mouvement imperceptible de vent fils flanchait la main de la gracieuse femme, qui écarta ses doigts d’une infime tendresse. La feuille tomba comme une feuille morte, et se déposa sur le sol chatoyant de poussières. Je la ramassai rapidement, et lisais les quelques mots esquissés.
Mon cher et tendre ami.
Votre prestance, votre souffle et vos mains me manquent. Ou sont donc passé nos journées infantiles d’enfances ? Ou avez-vous diable mis nos souvenirs ? Les roses exemplaires, les promenades rosés, les aubes dorées ?! Oh, mon cher et tendre, il se peut que vous soyez partis pour le haut delà, et ce sera pour cela que je ne vous enverrai pas cette lettre. Je ne peux me résoudre à penser vous ainsi. Les colombes roucoulent à mes fenêtres, et je pense à vous, comme l’on pense à une poupée d’enfance qu’on voudrait retrouver. Je ne vous aime plus, je ne vous aimerai plus jamais, car vous m’avez laissé, dans mon tour doré. Dans ce sanctuaire vivant, ou demain je me transformerai en statue. Ne t’inquiète pas, mon cœur s’envolera avec les tourterelles, mais mon amant, mon amour, tes larmes bientôt se poseront sur ce papier, et je ne pourrais plus rien. Car le malheur transforme la vie en une course d’obstacles plus haut que l’on ne peut aller. Vous étiez ma monture, vous me faisiez voler bien plus haut que tous ces obstacles. Mais je sais, je sais mon tendre, que tu ne pourras plus me porter. Je sais, je sais je ne te le jure, que je ne serai pas la à t’attendre. Car tu es partie, tu as laissé mes pétales rouges flétrir, tu as laissé l’ennui faire mourir mes traits. Tu as laissé la vie me durcir le visage. Tu m’as oublié comme on oublie un vêtement trop petit, trop sali. Tant pis, je me fiche de toutes les choses que tu as faite, tu n’es plus qu’un souvenir, je ne t’accepte plus, je ne pense plus à toi, mes pensées gèleront. Mes mains, tout mon corps ne sera que marbre. Je te souhaite du regretter, de pleurer autant que tu le peux. Je te souhaite de connaître ce que c’est que vivre sans personne. À attendre. À voir les jours languir, à voir sa peau s’étioler comme les restes d’une civilisation. Je te souhaite de voir tes souvenirs s’oublier dans ta mémoire. Je ne te souhaite que du malheur. Du malheur.
Rejoins-moi vite
Je lâchai la lettre comme si elle me brûlait. Son contact me gênait. Elle semblait lourde. Lourdes de mots qui ne m’appartenaient pas. C’était le malheur d’une femme qui s’était posée là. Je ne pouvais m’empêcher de penser à cet homme affreux qui l’avait laissé là. Le papier était sali par des traces de doigts. Son amant, lui aussi, avait du passer par là. Je tournai autour de la statue, à la recherche d’un indice, d’une chose qui me prouverait que l’homme était partis, qu’il ne reviendrait plus. J’éprouvais une haine fugace à cet homme que je ne connaissais pas. Je comprenais le malheur de cette pauvre femme, attendant à la fenêtre le retour d’un homme qui l’avait trahi.
Il était là. Loin derrière, dans l’ombre de la fenêtre. Son visage était mélangé de plein de sentiments. Une fierté non dissimulée, mais des regrets et une douleur infinis se lisait sur ses mains, recueilli en forme de prière. Je levai ma main et suivis le contour de son visage. Ses cheveux lui arrivaient aux épaules, blancs comme les restes des statues, son visage avait quelque chose de boudeur, un refus. Il était habillé d’une simple veste fatiguée, et d’un pantalon couleur d’ivoire. Sur son piédestal, étaient écrites des runes anciennes que je ne compris pas. Son visage m’était familier, je ne supportais pas ses yeux arrogants et fiers, sa posture suppliante mais vaniteuse. J’éprouvais pour lui une haine profonde.
La femme statue était tourné vers moi. Rien n’avait bougé, mais une impression d’être observée me prit à la gorge. Je m’époussetai rapidement et regardai encore une fois la femme statue. Son regard semblait porter directement à mes yeux. Je soutenais son regard. Les larmes me montèrent rapidement au yeux. Je pensais à cette femme que tout avait oubliée. Elle avait perdu jusqu’à l’essentiel de vie. Elle n’était que statue, mais son regard me parlait. Il me disait « Regarde ce qu’il m’a fait subir. Admire ma tristesse, et venge-moi ».
Mais je ne pouvais pas venger , je ne voulais pas. Je ne connaissais rien. Mes yeux brouillés par les larmes brûlantes qui coulait comme autant de poids sur mes joues. Et les yeux de la femme, qui continuait de me percer, remplis d’une lassitude, d’une haine telle qu’il m’enserrait la poitrine. Je ne pouvais plus bouger, son étau enfermait mon corps. Je sentait tout ses sentiments. Je ne faisait plus qu’une, la statue et moi. Moi et la statue. Je voyais, je sentais les pensées fortes et brûlantes de cette femme perdu dans le malheur de l’oubli. Je voyais les diners le soir, seule, devant sa fenêtre. Je sentait ses espoirs, ses montés d’espoirs lorsque l’ombre d’un cavalier naissait à l’horizon. Je sentais son désarroi, ses crises de colères et de larmes. C’ était le malheur d’une femme que je portais sur mon dos, fardeau non choisis, fardeau d’une vie. Et je sentais mes membres doucement fléchir, et se poser au sol. Mes mains cherchèrent à tâtons ma sacoche et sortir ma fiolle d’alcool. Je sentais montai sa fatigue qui prenait doucement chaque parcelle de mon corps. Je n’avais plus la force de lever le bras. Chaque minimes partie de mon corps pesait du plomb. Je sentis sur moi une main bienveillante. J’entendis une voie douce me sussurer que tout aller bien. Je voyais des ombres mouvantes. Et je sentait le noir partout. Je restait pendant, il me sembla, des heures, perdu dans les méandres de mon esprit et de l’esprit de la femme statue. Fièvreusement noir.
Je me réveillai dans un état pateux, et posais des regards interrogateurs autour de moi. Un homme était là, tout blanc. J’étais déjà au paradis . Morte ? Comme tant en sont devenus ? Il s’approcha de moi. Je me reculai.
J’essayai de sourire, mais ma bouche avait un goût de carton pate. J’adressai un petit signe de tête. Il partit. J’admirai au plafond les moulures dorées d’un ancien monde dans un état comateux. Les formes se perdaient parfois et des couleurs criardes me sautaient dessus. Lorsque ma vue se fut plus claire, je regardai ou je me trouvais. C’était toujours la même pièce. Les deux statues étaient encore là, la lettre était encore par terre, comme antant de souvenirs. Je me relevai du sol ou j’étais couché et m’étirai. Ma sacoche se trouvait encore sur mon épaule, mais mes vêtements avaient été changés pour une combinaison blanche. L’homme que j’avais vu revint précipitamment et m’indiqua la sortie. Il me dit que ce n’était pas grave, que ce n’était qu’un traumatisme. Que, bien sûr, ça durera à vie, et que je pouvais m’en aller. J’obtempérai, sans savoir ce qui n’était pas grave. Tout était décidément blanc. Tout en me rendant compte, que lui aussi était aussi blanc que du marbre. Et que… Que… Je poussai d’abord un petit cri d’exclamation et levai ma main vers mon visage. Elle était blanche comme du cristal, reflétant les chaudes couleurs du soleil. Mes jambes que j’avais crues entravé dans une combinaison étaient en fait rien que ma peau. Je partais juste un débardeur vert d’eau et un pantalon court jaune. Ma peau n’avait aucune nuance beige, juste du blanc. Rien n’avait changé, mon agilité était la même, je me souvenais de tout. J’avoyai les pliures de ma peau, mes muscles. Tout était blanc.
Je passai la porte qui me faisait face, en entendant derrière moi :
« Voilà une dernière recrue. Bienvenue chez les statues, Nébuleuse. »