Tout au bout du bord de l’extrême, derrière les dernières montagnes du Monde, s’élève le Château des 100 000 pièces Les murailles, et les tours et les étages de ce palais s’élèvent, à ce qu’il vous paraît, bien au-delà des nuages, au-dessus des cimes.
LA PIÈCE AUX FAITS INEXPLICABLES, ou LE DOMAINE DES REVES ET DE L’IMAGINAIRE
LA PIÈCE AUX FAITS INEXPLICABLES, ou LE DOMAINE DES REVES ET DE L’IMAGINAIRE

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LA PIÈCE AUX FAITS INEXPLICABLES, ou LE DOMAINE DES REVES ET DE L’IMAGINAIRE

Mask as Mask (bientôt Birdeta)

La porte m’avait envoyée dans une pièce terriblement poétique. J’ai d’abord été effrayée, puis fascinée. En entrant, j’avais déjà senti l’ambiance surréaliste qui y habitait. Et je errais sans but, dans la nuit d’encre voilée qui me suivait telle une seconde peau. La neige, chaude, crissait sous mes pas envolés. Des dizaines de méduses fluorescentes m’escortaient dans ma marche hasardeuse. Je les contemplais un moment: roses délavées, leurs corolles palpitaient doucement, comme autant de froufrous qui habillaient leurs longues tentacules. Comme surprises par un courant inexistant, certaines dérivaient paresseusement, et s’évanouissaient dans le noir. Puis une pluie de pétales de cerisiers m’éclaboussa d’une centaine de rires, d’une multitude de rires qu’elles avaient trouvés sur leur chemin. Avançant toujours, je croisais les doigts d’un vieux musicien au costume défraîchi, qui courraient sur les dents d’un piano en bois de rose. Je marchais encore, puis je m’arrêta, devant un lampadaire à la lumière jaunâtre. Mais j’entendis la neige crépiter sous mes pas qui n’interrompirent pas leur déambulation. Ils avaient décidés de continuer. Mais pas moi. Car sous le lampadaire, une petite fille à genoux sanglotait. Je le vis à son petit dos qui tressautait sous ses hoquets étouffés. Elle m’attirait inexplicablement, et j’éprouvais soudain un élan de compassion, le besoin de la consoler, de la rassurer, de lui dire que je suis là, qu’elle n’est pas seule. Je m’agenouilla silencieusement à ses côtés. Ses cheveux, entremêlés d’aiguilles de pin, étaient violines. Ils me cachaient son visage. Après un temps, je lui touchai délicatement l’épaule. Elle tressaillit, et m’adressa enfin la parole, sans me regarder:

-« Je suis tellement désolée, je vous supplie de me pardonner ! Qu’ai-je fait ? »
-« Mais de quoi parles-tu ? répliquai-je gentiment. Ses mains étaient crispées autour d’une petite épuisette au filet troué.
-« Je t’ai laissée partir. Je suis désolée. Vraiment »
Pauvre petite, elle perd la tête ! J’allai rétorquer que j’étais bel et bien là, auprès d’elle, quand elle tendit un doigt inquisiteur devant elle. Et ce que je vis me fit écarquiller les yeux d’horreur. Une femme marchait. Elle était de dos. La neige crissait. Elle se retourna. Me regarda. Son visage était le mien. Elle était moi.
-« Je suis tellement désolée de ne pas avoir rattrapée ton âme »
Elle tourna enfin la tête vers moi. Ses orbites abritaient un vide absolu. Du noir, et du noir.
-« Maintenant, tu es comme moi. Damnée. »
Je n’essayais même pas de rattraper la femme, ainsi que la petite fille aux cheveux violines dont elle tenait la main. Je sombrai.

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